Je crois sincèrement que les sentiers nous inspirent. Qu’ils peuvent nous changer comme nul autre. Qu’ils ont une force propre à eux-mêmes. Ils peuvent reconstruire et déconstruire les fondements de notre être. Ils sont pour moi les maçons de mon âme. D’aucuns diraient plutôt qu’ils sont “les plombiers”, de par mes origines polonaises, mais je m’égare.
“J’avais des périodes très sombres avant de partir. La marche dissipe les nuages noirs.” dit Sylvain Tesson, au retour de sa traversée et de la publication de son livre Sur les chemins noirs. Lui, l’écrivain aventurier qui méprisait les simples chemins s’est finalement réconcilié avec eux autant qu’avec lui-même. Et moi qui les aiment tant, particulièrement les sentiers de montagne, qui avec mes humbles mots vous partagent l’ivresse de mes pas, comme dernièrement avec mes impressions du Népal, j’ai voulu connaître ceux qu’emploient mes collègues pour répondre à cette simple question :
Qu’est-ce que la randonnée pour toi ? Découvrez sept textes et autant de regards.
Karine Decorde
Je marche…
Dans la nuit, au coin du feu Une étoile chante à mon oreille. En silence, Je l’écoute me dire, Les chemins de pierre, de terre Ou de sable fin.
Je marche derrière l’étonnante mélodie Des vents d’hiver dans le ciel glacé. Qu’importe la foulée, Le coeur bat au rythme Des pas, du souffle et de la montagne.
Je marche suivant les couleurs de l’automne Aux travers des vallées Qu’importe la route La nature nous égare Pour nous approcher.
Je marche sur les crêtes de l’été Au delà des rocailles dénudées Qu’importe l’altitude La tête tourne toujours De cette liberté soudaine
La présence éphémère Que je ressens ici N’a d’égal que l’innocente beauté D’un ruisseau sauvage.
Une branche de bouleau Recouverte de neige. La porte entrouverte D’un refuge accueillant.
Un regard échangé avec l’izard au coin du jour Les couleurs du couchant Dans le chant de la grive.
L’emprunte éphémère Que je laisse au matin Me porte vers les cimes, Les forêts de pins…
son blog : Rêves et Sac à dos
Alexis Poraszka
Quand j’étais petit, je n’aimais pas marcher. Pour moi, petit fainéant, c’était synonyme d’effort et d’ennui et c’est toujours à reculons que j’accompagnais mes parents. Puis j’ai grandi, j’ai voyagé, j’ai marché et j’ai fini par adorer la randonnée. Il y a dans la randonnée un esprit de liberté. On se sent plus en harmonie voire en dialogue avec les éléments qui nous entourent. C’est comme si, à chaque pas, la nature et moi ne faisions qu’un. C’est cette communion et cette symbiose avec la nature qui me plaît autant. Mais faire de la randonnée, c’est aussi prendre son temps, lâcher prise avec un mode de vie nous imposant toujours plus de rentabilité, toujours plus de rapidité. Quand vous êtes sur votre sentier avec vue sur la montagne, quand les cailloux crissent sous vos chaussures, quand le bruit du vent dans les arbres vous chante aux oreilles, on oublie tout le reste. Pour ma part, j’oublie les deadlines et le métro, le téléphone qui sonne et ma connexion qui déraille, mes voisins qui font du bruit et mon compte en banque qui tire la tronche. Je pense à moi, aux battements de mon cœur, à mon souffle. Je pense à cette petite fleur bleue que j’ai failli écraser ou à cet arbre sec perdu au milieu du désert. Randonner, c’est retrouver un petit côté nomade et se sentir capable d’aller au bout du monde, car marcher ça donne des ailes, du courage et confiance en soi.
son blog : Le Petit Explorateur
Jérôme Derèze
La randonnée, c’est quoi pour toi ? La randonnée est pour moi synonyme d’évasion. Le simple fait de se retrouver en pleine nature, que ce soit en forêt ou en montagne, procure beaucoup de bienfaits. Et c’est une joie de les ressentir. J’ai commencé à apprécier véritablement les randonnées dans les grands espaces de l’Ouest Canadien. La beauté des paysages doit y être pour quelque chose aussi ! Pouvoir parcourir de nombreux kilomètres pour accéder à des points de vue magnifiques offerts à nos yeux, des paysages que peu de personnes ne prennent la peine et l’effort pour aller les contempler. La randonnée, offre un sentiment de liberté face à la nature, à la contemplation des animaux habitant ces lieux. Admirer la faune et la flore tout en parcourant des kilomètres sans s’ennuyer un instant. Randonner dans différents lieux permet aussi de prendre conscience de la grandeur de notre monde.
À mes yeux, le plaisir de la randonnée est d’avantage plus important au fur et à mesure qu’on la pratique. Et rien de tel que de se retrouver seul ou à deux loin des groupes de touristes. Un peu comme si l’on était seul au monde au beau milieu de la nature. Une chose est sûre, je continuerai à randonner, et ce dès que je pourrais.
son blog : Traversée d’un monde
Camille Visage
Je suis bretonne. Alors, autant vous dire que la randonnée n’est pas innée chez moi. Oui, les balades en bord de mer, les promenades dans les champs, ça je connais. Mais la randonnée, celle qui te fait monter des montagnes, traverser des forêts à pic, découvrir des lacs d’altitude. La randonnée qui te fait hésiter, persévérer et enfin t’émerveiller. Cette randonnée-là, je l’ai découverte en arrivant en Autriche il y a 1 an et je ne peux plus m’en passer.
En Autriche, j’ai découvert les montagnes, les Alpes pour être précise. Ici, quand on veut découvrir les environs, on a pas le choix, il faut grimper. Au début, c’est dur, on se demande ce que l’on fait là, pourquoi on n’a pas pris la voiture. Et puis, on persiste. On découvre la beauté des Alpes, son silence, sa faune, sa flore, ses forêts, ses vallées. Tout ce que la randonnée a à nous offrir.
La randonnée me fait réfléchir. Mes pensées filent à chacun de mes pas. Je suis essoufflée et je me sens bien. J’ai l’impression d’y voir plus clair sur tout ce qui me tracasse au quotidien. Je me retrouve avec moi-même. La montée est difficile, mais je suis déjà fière du chemin parcouru. La promesse d’un point de vue est plus forte que la fatigue. Puis enfin, j’arrive à ce point de vue que j’espérais. Et la magie opère. Je me sens toute petite face à ce paysage qui m’englobe, m’émerveille et m’inspire. Je me sens libre et capable de tout.
son blog : Sense Away
Roxanne Regimbald
La randonnée pour moi c’est le dépassement de soi, la liberté et le bonheur total. Lorsque je marche en montagne, je me concentre sur chaque pas qui me fait avancer et je suis connecté directement au présent. N’y le futur, n’y le passer sont dans mon esprit, seulement le moment présent. Ce moment, où tu sens la douleur dans tes mollets, ton corps se réchauffer au rythme de ta randonnée et le vent frapper contre ton visage lorsque tu atteins le sommet, est une sensation de pur bonheur! J’adore ce sentiment d’accomplissement immédiat, même si chaque pas peut sembler douloureux en randonnée, on se donne la force nécessaire pour aller jusqu’au sommet. Lorsqu’il s’offre à nous, la vue se tattoo d’une encre indélébile dans notre esprit. Cette amante, la randonnée, me fait sentir vivante et m’apporte la sérénité dont j’ai besoin. Pour moi, c’est un moyen d’en apprendre plus sur moi, d’en apprendre plus sur mes capacités et me permet de me perdre complètement dans mes pensées. Plus les heures passent et plus les kilomètres s’accumulent, plus je me rends compte de la persévérance dont je fais preuve. Avec mon amante, je me sens défier les montagnes, le temps et la douleur. Avec elle, j’irai toujours au bout des montagnes jusque dans les nuages.
son blog : My Wonder Land
Samuel Bourille
La randonnée c’est l’effort, le repos, le feu et l’apaisement. La randonnée c’est l’expérience de la liberté et l’endroit de l’introspection, c’est atteindre les sommets et les profondeurs de l’âme, c’est réunir le corps et l’esprit. Pour moi il n’y a que la montagne et l’océan qui peuvent m’amener à me reconnecter de la sorte. Car c’est bien d’une reconnexion qu’il s’agit et non d’une déconnexion comme on pourrait l’imaginer. La randonnée, et donc la marche en montagne, c’est se rappeler au monde, à la vie, à la terre. Loin d’un vision ésotérique, je parle là au contraire d’une sensation physique, brute et très concrète de se sentir à nouveau appartenir à un état de nature. La randonnée c’est s’inscrire dans un paysage, y déposer ses pas et que chacun d’eux nous amène inconsciemment vers le repos, la contemplation, le goût de l’effort mesuré, celui de l’humble face à la puissance du colosse. La randonnée ramène à soi et au monde, elle porte à la rêverie et apaise les sens, elle est l’antidote suprême au monde moderne ultra(dé)connecté. L’air frais de l’aube dans les narines, le poids du soleil sur la nuque, le goût de l’eau du torrent, la tendresse de l’herbe et la rudesse du caillou, la transe de l’effort et puis le sommet… le goût du chemin parcouru, l’insanité d’un panorama et l’envie de rester là, longtemps… mais il faut rentrer maintenant, la descente, la course, l’adrénaline et puis le refuge, le repas des amis et le repos du juste.
son blog : les vents nous portent
Vincent Beau
Lorsque j’enfile mes chaussures de randonnée, je retrouve cette drôle de sensation de départ en voyage… Peu importe l’endroit. Je ressens un mélange d’excitation et d’impatience. J’ai le sentiment d’avoir mon esprit un peu plus ouvert, en route vers une destination inconnue…
Je suis plus alerte, mes cinq sens sont à fleur de peau. Sur les sentiers, je m’émerveille devant un simple tronc d’arbre. Je respire à pleins poumons l’odeur de la mousse en forêt… J’écoute le chant des oiseaux ou le vent dans les arbres… Je recherche des traces d’animaux… Mon côté sauvage reprend le dessus. J’observe la nature à son état brute.
Et puis il y a aussi des moments plus difficiles… Comme dans la vie, certains passages d’un sentier sont une épreuve. Les distances, le mauvais temps, l’altitude… Autant d’éléments qui te ralentissent en chemin. La randonnée te donne alors l’occasion de tester tes limites. Il faut savoir rester humble. Dans ces moments délicats, la nature te rappelle souvent que l’homme est bien peu de choses !
Cette nature sauvage m’invite aussi à la réflexion et aux rencontres. J’aime randonner pour me déconnecter et revenir a l’essentiel. Aussi, pendant les sorties en groupe, les échanges sont plus simples, sans artifices. Les sorties finissent souvent autour d’un repas convivial avec de belles rencontres.
Voilà, la randonnée c’est pour moi une véritable école de la vie… C’est l’occasion de se retrouver face à la nature, de se remettre en question et de rencontrer l’autre… C’est un voyage à l’état pur
son blog : Regard Nomade
couverture article : image de Camille Visage du blog Sense Away
En avril, il s’est enfui au Pérou pour célébrer sa victoire dans le Camino Inca de 4 jours. Es hermoso, es hermoso, terminamos escalando Huayna Picchu, impresionante. ¡Yo recomiendo!
Hello,
J’adore le sentiment de liberté que je ressens quand je suis au sommet de la montagne. Je me sens en osmose avec la nature et cela me fait énormément de bien. 🙂
Bonsoir Piotr, je t’apporte la preuve que je lis aussi ton deuxième blog, c’est un régal merci à toi
Bergantin.
Welcome Bergantin 🙂
Merci Piotr avec plaisir. Je trouve tous ces commentaires très intéressants, et surtout quand même rassurants pour l’avenir, de voir tous ces jeunes retrouver vraiment ces sensations toutes simples, en prise direct avec la nature. J’avais un peu oublié que cela pouvait encore exister, au vu de la précipitation et de l’éphémère ambiant. Etant moi même adepte des randonnées (pédestres ou cyclo) je me sens parfaitement en phase avec les sensations décrites dans cet article. Bravo et merci à tous pour ces beaux récits.
On retrouve cet idée de connexion à la nature et de déconnexion au reste du monde dans les témoignages et c’est ce que l’on recherche aussi. Au-delà de l’effort physique, de la volonté de surpasser ses capacités, on recherche à être seul au monde. Rien de plus frustrant que se retrouver sur les chemins avec des dizaines d’autres randonneurs! Mais cela arrive et parfois, c’est des occasions aussi de rencontres et de partages.
bah, on les dépasse vite les autres randonneurs mais comme tu le dis Laura, c’est aussi l’occasion de rencontres…
Très intéressant de lire ces témoignages ! Chacun a sa façon d’exprimer son ressenti par rapport à la randonnée et en même temps on retrouve des avis assez similaires dans le fond.
Pour ma part, je me retrouve complètement dans ces témoignages. Une sensation de liberté en randonnée, loin de la vie à 100 à l’heure du quotidien. C’est un moment où on se recentre sur soi et ses sensactions. L’effort physique est très souvent récompensé par des paysages magnifiques. Que du bonheur ! 🙂
oui il y a des thématiques commune. Je crois que l’on ressent tous cette sensation de liberté 🙂
Il y a quelque chose de commun dans ces témoignages, c’est une certaine douceur, une poésie dans l’expérience du trek. Les forêts du Québec me manquent pour ça. On me dit que le Pérou, c’est le paradis de la randonnée, mais moi j’aime le vert, l’odeur de la terre mouillée, être entourée de grands arbres, sentir les feuilles qui craquent sous mes pieds, dans les Andes ce n’est pas la même ambiance. C’est autre chose, une autre expérience. Et même dans la jungle toute verte, épaisse et magnifique, ce n’est pas la même ambiance. Je n’arrive pas à la retrouver, pas encore. Mais je cherche, le Pérou est immense après tout 🙂
je n ai pas assez vadrouillé au Pérou pour te répondre mais je pense qu’il y a de beaux sentiers aussi à découvrir et faire découvrir !